FIGAROVOX/OPINION - En cette période de coupe du monde, Marc Perelman dénonce la «footbalisation des esprits» qui, selon lui, conduit à une atmosphère de dérision généralisée et à une forme de servitude collective.
«Il est incroyable de voir comme le peuple, dès qu'il est assujetti, tombe soudain dans un si profond oubli de sa liberté qu'il lui est impossible de se réveiller pour la reconquérir: il sert si bien, et si volontiers, qu'on dirait à le voir qu'il n'a pas seulement perdu sa liberté mais bien gagné sa servitude.» (La Boétie, Discours de la servitude volontaire)
Extrait : La Coupe du monde de football qui se déroule actuellement en Russie est l'expression la plus caractéristique d'au moins trois aspects de la soumission qui se manifeste chez la plupart de nos concitoyens assujetti à l'empire-football et qui semble s'être durablement incrustée dans les consciences.
Le premier aspect est la régression infantile que l'on sait significative dans la musique de variété, ou de masse, et qui «contribue avec le sport et le cinéma à rendre impossible tout arrachement à l'infantilisation générale des mentalités» (Adorno). Chez les supporters les plus acharnés et les critiques en apparence les plus mordants qui, bien sûr, ne supportent pas que le football soit envahi par l'argent, s'opère un grand retour en arrière, vers leur belle jeunesse, dont ils nous parlent les yeux embués et la gorge serrée par l'émotion. Après un «Je me rappelle…», il s'ensuit un flot ininterrompu de souvenirs qui va d'un dribble époustouflant ou d'un coup franc miraculeux à la vague de nostalgie d'un souvenir toujours présent d'une victoire écrasante ou d'une défaite humiliante ou injuste. Les consciences déjà atrophiées par la violence de la réalité sociale sont alors vidangées de la moindre once d'analyse ou même simplement d'une prise de recul par rapport au réel d'un football si prégnant.
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Source : LE FIGARO