Justice des mineurs en Chine : ce qui devrait changer avec la nouvelle loi de juin 2025

  • Auteur de la discussion Auteur de la discussion Mathieu
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Mathieu

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15 Oct 2006
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Shanghai, People Square
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📢 Parents expats, cette info vous concerne indirectement ! La Chine s'apprête à durcir sa législation sur la délinquance juvénile avec une révision majeure de la loi sur les sanctions administratives. On décrypte ensemble ce qui pourrait changer concrètement.

Le contexte : pourquoi cette réforme maintenant ?​

Depuis l'affaire du meurtre de Handan en mars 2024 (trois ados de 13 ans accusés d'avoir tué un camarade), l'opinion publique chinoise réclame des mesures plus strictes contre la délinquance juvénile. Les autorités ont répondu avec ce projet de révision de loi, qui sera examiné pour la troisième fois (et probablement la dernière) par le Comité permanent de l'Assemblée populaire nationale du 24 au 27 juin 2025.

Ce qui frappe dans les données officielles, c'est le paradoxe : les statistiques montrent une baisse globale de la délinquance juvénile depuis 2008, mais quelques affaires ultra-médiatisées ont créé une volonté de réforme.

Les changements majeurs à l'égard de la délinquance des mineurs en Chine qui pourraient impacter directement nos ados​


1. Détention administrative dès 14 ans​

C'est LA grosse nouveauté qui fait débat. Actuellement, les 14-16 ans sont exemptés de détention administrative pour des infractions mineures. Si le projet est adopté :
  • Détention possible dès la deuxième infraction dans l'année pour les 14-16 ans
  • Ou dès la première si les "circonstances sont graves" et l'impact "notamment négatif" (termes volontairement flous qui laissent beaucoup de marge d'interprétation aux autorités)
  • Les 16-18 ans pourraient aussi être détenus dès la première infraction avec "circonstances graves"

2. Plus aucune impunité pour les moins de 14 ans​

Fini le retour direct chez les parents avec un simple avertissement. Les autorités devraient obligatoirement appliquer des "mesures correctives et éducatives" selon la gravité des actes, en accord avec la Loi sur la prévention de la délinquance juvénile (révisée en 2020). Ça peut aller de la réprimande à l'éducation spécialisée en passant par des mesures de correction ciblées.

Ce qui changerait pour les écoles (y compris internationales)​

⚠️ Point crucial pour les parents : les écoles auraient une obligation légale de signaler et gérer les cas de harcèlement scolaire. En cas de manquement, l'établissement serait sommé de corriger sa gestion et le personnel responsable risquerait des sanctions disciplinaires.

Concrètement, les établissements devraient :
  • Mettre en place des protocoles anti-harcèlement documentés
  • Former leur personnel aux nouvelles obligations légales
  • Signaler les cas graves aux autorités de sécurité publique
  • Documenter tous les incidents (même mineurs)
Les écoles internationales de Shanghai et Pékin anticipent déjà ces changements. Plusieurs parents de la communauté nous ont signalé avoir reçu des circulaires détaillant de nouveaux protocoles.

L'éducation spécialisée : le retour déguisé des centres de détention ?​

Le projet de loi s'aligne sur le système créé par la Loi sur la prévention de la délinquance juvénile de 2020 :
  • Éducation spécialisée : pour les comportements "inappropriés graves"
  • Éducation corrective ciblée : pour les actes criminels commis par des mineurs non pénalement responsables
Ces établissements, officiellement sous tutelle du ministère de l'Éducation, fonctionnent avec une "gestion en circuit fermé" supervisée par la police. Beaucoup y voient une version remaquillée de l'ancien système de "détention éducative" aboli en 2020.

Ce que ça signifie pour nous, parents expats​

1. Vigilance accrue sur le comportement de nos ados​

Si ces dispositions sont adoptées, même une bagarre dans la cour ou du cyberharcèlement pourraient avoir des conséquences bien plus lourdes qu'avant. Important de sensibiliser nos enfants aux risques, surtout ceux qui arrivent en Chine et ne connaissent pas encore bien les codes.

2. Communication renforcée avec l'école​

Plus que jamais, il faudra maintenir un dialogue étroit avec l'établissement scolaire. N'hésitez pas à demander :
  • Leur protocole anti-harcèlement actuel et leurs plans d'adaptation
  • Les canaux de signalement mis en place
  • Comment ils comptent former le personnel

3. Comprendre les zones grises​

Les termes "circonstances graves" et "impact notamment négatif" restent volontairement flous. Dans la pratique chinoise, cela signifie que l'application variera selon les provinces et même les districts. Ce qui passe à Shenzhen peut coincer à Pékin.

En pratique : ce qu'il faut retenir​

  • Statut actuel : Projet de loi en troisième lecture du 24 au 27 juin 2025
  • Détention possible dès 14 ans pour des infractions répétées ou "graves"
  • Les écoles auraient obligation légale de gérer le harcèlement sous peine de sanctions
  • Plus aucune impunité : mesures correctives obligatoires même pour les moins de 14 ans
  • Des termes flous qui laissent beaucoup de pouvoir discrétionnaire aux autorités locales
  • Un système d'"éducation spécialisée" qui ressemble fort à de la détention éducative
Cette réforme vis à vis de la délinquance des mineurs s'inscrit dans la tendance générale de "sécurisation" de la société chinoise. Pour nous, communauté francophone, l'enjeu est de bien comprendre ces nouvelles règles potentielles pour mieux protéger nos enfants tout en leur apprenant à naviguer dans ce cadre légal en évolution.

Note importante : Cet article se base sur le projet de révision tel que présenté avant sa troisième lecture. Le texte final pourrait encore évoluer lors des débats parlementaires.

Vous avez des questions ou des retours d'expérience sur l'application des mesures actuelles ? Les commentaires sont ouverts !

Source : Global Times
 
Dernière édition:
C'est intéressant de voir que le pays est réceptif à la demande du peuple pour un enjeu pourtant limité en nombre même si des affaires ont défrayé la chronique... alors que chez nous où cette délinquance des mineurs est un problème majeur, on est dans l'incapacité d'y apporter des réponses coincés par le manque de volonté politique et un conseil constitutionnel très a gauche qui constitutionnalise des principes qui ne l'étaient pas à l'origine... ci bien qu'on ne peut rien changer sans réforme constitutionnelle (donc jusqu'en 2027).

Deuxième point intéressant, on pense au phénomène et à ses réponses pour les autres mais il ne faut pas oublier que ces lois vont s'appliquer à ses propres enfants... on passe du théorique au pratique rapidement dans ces cas. Mais bon là aussi combien d'enfants sont victimes de harcèlement, vol avec menace ou violence, violence gratuite voire attaque à l'arme blanche en France...

La Chine est sans doute un peu précoce dans son application de la loi mais c'est aussi ca qui fait qu'elle a moins de soucis quand on attend chez nous que les problème soient devenus ingérables pour oser les nommer (et toujours pas en soigner les causes).
 
la nechi, ce pays réfractaire à la 32ème chance
 
On ne peut pas dire que la proportion d'homicides soit très faible, de sorte qu'il n'y a pas lieu de formuler les lois pertinentes. En Chine, les homicides sont souvent punis par réciprocité, c'est-à-dire condamnés à la peine de mort, mais la décision dépend des circonstances de l'affaire.
 
Tout en Chine est fait pour éviter les soulèvements et les manifestations. Autant prévenir les possibles contrevenants à l’avance sur les possibles sanctions si ils sont pris.
 
Ce qui concerne l'école me laisse dubitatif. On sait comment ça se passe dans les écoles publiques : aucun incident, pas de bagarre, pas de harcèlement... officiellement. Tout est géré en off avec arrangement à l'amiable entre les familles, et aucune communication + censure sur Wechat. Aucun directeur n'ira rapporté des incidents qui pourraient nuire à la réputation de son école et à la suite de sa carrière. Idem dans le privé : une mauvaise réputation ferait fuire les clients (pardon, les futurs élèves). Bref les incidents "mineurs" passeront sous les radars comme maintenant. Par contre les gros cas (crimes) seront punis plus sévèrement (y compris les profs ou directeurs d'école qui n'auraient pas remonté les risques encourus à temps). On arrive à un point où des profs commencent à se prendre des coups par des élèves (1 ou 2 cas rapportés récemment). Petit à petit, les profs vont commencer à laisser faire pour éviter les coups et les emmerdes (parents qui n'hésitent plus à se plaindre des profs).
Pour moi quand un gosse de 13-14 ans agresse quelqu'un au couteau en Chine, il serait bon de se poser les bonnes questions. Soit le type sait déjà qu'il fout sa vie en l'air quand il passe à l'acte et est-ce que doubler ou décupler les sanctions l'empêcheront de le faire ? Soit il ne le sait pas et la réponse est la même.
 
Pour moi quand un gosse de 13-14 ans agresse quelqu'un au couteau en Chine, il serait bon de se poser les bonnes questions. Soit le type sait déjà qu'il fout sa vie en l'air quand il passe à l'acte et est-ce que doubler ou décupler les sanctions l'empêcheront de le faire ? Soit il ne le sait pas et la réponse est la même.
Pour avoir discuté avec quelques collègues de la peine de mort, leur vision n'était pas tant le côté disuasif que la "juste" punition par rapport au crime commis. Je ne sais pas dans quelle mesure ce qui est annoncé ici est pour répondre à la demande de "justice" VS ce qui vise à empêcher le crime d'arriver