Reflexions & ruptures sociologiques de notre epoque ...

La désintégration de la cohésion sociale

Face à la montée de la crise sociale, la thèse de la montée des inégalités est celle qui aujourd'hui rallie le plus largement. Elle n'est pourtant pas aussi évidente. Au plan mondial, il y a la fameuse courbe de l'éléphant de Milanovic qui pointe le déclassement relatif des populations riches (sans être hyper riches).


Extrait :
Qui recouvre en fait, à ce niveau mondial d'observation, les classes moyennes des pays avancés. Mais ne fait que surligner le fait que les économies avancées ont perdu leur pouvoir de captation de la valeur et de prédation des ressources au détriment des économies moins développées. Et puis il y a toutes les variantes autour des travaux de Thomas Piketty qui soulignent l'envolée d'un groupe très particulier et très restreint d'hyper-riches. Mais qui aboutit à des constats différenciés et peu tranchés pour le reste de la population selon les pays. La dislocation du corps social par le jeu des inégalités est du coup très contestable, le malaise social commun à toutes les économies étant loin d'être indexé sur les indicateurs d'inégalités.

 
Goldnadel: «Et pour Corinne Masiero, le César de... la stupidité raciste et anti-chrétienne!» Gilles-William Goldnadel est avocat et essayiste. Chaque semaine, il décrypte l’actualité pour FigaroVox. Son dernier ouvrage Névroses Médiatiques. Le monde est devenu une foule déchaînée est paru chez Plon.

FIGAROVOX/TRIBUNE - L’avocat et chroniqueur remet ses propres César de la semaine. Et étrille notamment la comédienne, qui a jugé que les «bourgeois hétéros catholiques blancs de droite» avaient trop d’influence sur le cinéma français.

Extrait :
L’actualité artistique et politique tournant autour des Césars, mon lecteur souffrira que j’en attribue certains aux plus méritants.

Le César de la stupidité christianophobe est attribué par acclamations à Mme Corinne Masiero, comédienne, pour avoir déclaré dans les colonnes de Télérama à propos du manque de diversité de l’académie des César: «Il faut plus de diversité, pour être plus représentatif du métier et de la société. Ce n’est pas des bourgeois hétéros catholiques blancs de droite qui ont, seuls, le droit de dire qui il faut récompenser en France.»

Il est vrai que les Lellouche, Klapisch, Kassovitz, Guédiguian, Hazanavicius, Polanski, Omar Sy, Thompson… tous ces cathos de droite menacent la diversité du cinéma français.


 
"En 10 ans, Instagram a modifié notre façon de manger, de voyager, de draguer, d’acheter"

En dix ans, l’application s’est infiltrée dans nos vies jusqu’à modifier nos comportements. Une vitrine magique… parfois très éloignée de la réalité. Décryptage.


Extrait :
On ne regarde plus les couchers de soleil de la même façon, on filme les défilés de mode et les concerts, on photographie nos plats avant de les manger, on publie une photo de disparus accompagnée d’un #RIP (repose en paix), on partage son mood et ses vacances, on se géolocalise, on like, on regram, on storise, on scrolle et se selfise. On met parfois certains comptes en sourdine, on envisage souvent la détox. En 2020, Instagram célèbre ses dix ans. En une décennie, l’application, qui réunit plus d’un milliard d’utilisateurs dans le monde, a provoqué une véritable révolution qui a changé nos vies sous bien des aspects. Passage en revue de ce que l’on peut appeler un raz-de-marée sociétal.

«Le jour où le pape a lancé son compte Instagram, je me suis dit : alors là, il se passe vraiment quelque chose !», raconte Charlotte Hervot, auteure de (Petit) guide de survie sur Instagram (Éd. Arkhê). «Qu’on le veuille ou non, cette application est entrée dans nos vies : elle la change et marque notre époque. S’intéresser à Instagram, c’est s’intéresser à ce que nous sommes en train de devenir», poursuit-elle. Et le constat est sans appel : «En dix ans, Instagram a modifié en profondeur notre façon de manger, de voyager, de draguer, d’acheter, de voir et d’être au monde.» Car oui, on s’instagramme avant de se rencontrer (ce n’est pas un hasard si les responsables de ressources humaines vérifient les profils des candidats avant un entretien), on affiche son nouveau-né (c’est le nouveau faire-part), on se souhaite son propre anniversaire («Happy birthday to me !») et on suit les comptes officiels de la famille royale britannique… Harry et Meghan ont même annoncé leur décision de rompre avec la couronne sur leur profil.

 
« La justice déçoit d’autant plus qu’elle a été idéalisée » par Fabien Trécourt

Quelle vision les citoyens ont-ils de la justice en France ? Quelles sont leurs critiques et attentes ? Comment perçoivent-ils les peines et quelles inégalités dénoncent-ils ? Analyse avec Cécile Vigour, spécialiste de l’analyse des politiques publiques et de la sociologie de la justice et du droit au Centre Émile Durkheim.

Fabien Trecourt :Vous avez publié il y a quelques mois les résultats de deux vastes projets de recherche1 sur la façon dont les citoyens perçoivent les institutions judiciaires (projets qui feront aussi l'objet d'un rapport pour la Mission de recherche Droit et Justice). Quelle idée nos concitoyens ont-ils de la justice ?

Cécile Vigour2 :
C’est contrasté. D’un côté, ils en ont une représentation très idéalisée. Ils sont attachés à l’idée de justice, comptent beaucoup sur cette institution et considèrent qu’elle est un pilier du vivre-ensemble. En même temps, l’expérience qu’ils en ont est souvent décevante ou amère. L’institution apparaît comme distante, difficile à comprendre, réservée aux personnes qui ont de l’argent… Ils pensent spontanément qu’il vaut mieux maîtriser certains codes, être doté d’un capital financier, culturel ou social, pour obtenir gain de cause.
Même sans avoir lu Bourdieu, beaucoup reprennent ainsi à leur compte une critique très politique et sociale de la justice : elle serait un instrument de pouvoir au service des dominants, participant notamment à un système de reproduction des inégalités. Cela nous a surpris car aucune question de nos enquêtes n’était posée en ce sens. Nous demandions par exemple : « Qu’est-ce que la justice pour vous ? », « Que pensez-vous de son fonctionnement ? » Et le thème des inégalités arrivait très vite sur la table.

Suite de l'entretien >>>


Selon que vous serez puissant ou misérable Les jugements de cour vous rendront blanc ou noir.
Contexte historique : 1678 Jean de LA FONTAINE (1621-1695), Fables, Les Animaux malades de la peste (1678).
 
Dernière édition:
"En 10 ans, Instagram a modifié notre façon de manger, de voyager, de draguer, d’acheter"

En dix ans, l’application s’est infiltrée dans nos vies jusqu’à modifier nos comportements. Une vitrine magique… parfois très éloignée de la réalité. Décryptage.

Extrait :
On ne regarde plus les couchers de soleil de la même façon, on filme les défilés de mode et les concerts, on photographie nos plats avant de les manger, on publie une photo de disparus accompagnée d’un #RIP (repose en paix), on partage son mood et ses vacances, on se géolocalise, on like, on regram, on storise, on scrolle et se selfise. On met parfois certains comptes en sourdine, on envisage souvent la détox. En 2020, Instagram célèbre ses dix ans. En une décennie, l’application, qui réunit plus d’un milliard d’utilisateurs dans le monde, a provoqué une véritable révolution qui a changé nos vies sous bien des aspects. Passage en revue de ce que l’on peut appeler un raz-de-marée sociétal.

«Le jour où le pape a lancé son compte Instagram, je me suis dit : alors là, il se passe vraiment quelque chose !», raconte Charlotte Hervot, auteure de (Petit) guide de survie sur Instagram (Éd. Arkhê). «Qu’on le veuille ou non, cette application est entrée dans nos vies : elle la change et marque notre époque. S’intéresser à Instagram, c’est s’intéresser à ce que nous sommes en train de devenir», poursuit-elle. Et le constat est sans appel : «En dix ans, Instagram a modifié en profondeur notre façon de manger, de voyager, de draguer, d’acheter, de voir et d’être au monde.» Car oui, on s’instagramme avant de se rencontrer (ce n’est pas un hasard si les responsables de ressources humaines vérifient les profils des candidats avant un entretien), on affiche son nouveau-né (c’est le nouveau faire-part), on se souhaite son propre anniversaire («Happy birthday to me !») et on suit les comptes officiels de la famille royale britannique… Harry et Meghan ont même annoncé leur décision de rompre avec la couronne sur leur profil.


Pas du tout pour moi, j'ai pas instagram.
 
Coronavirus: «La pandémie est révélatrice du déclin français» Ancien élève de l’École normale supérieure, Jean-Loup Bonnamy est agrégé de philosophie, et spécialiste de philosophie politique.

FIGAROVOX/TRIBUNE - La crise sanitaire en cours révèle les fragilités stratégiques françaises, plaide le spécialiste de philosophie politique Jean-Loup Bonnamy. Selon lui, la Corée, qui était en 1950 un pays du Tiers-Monde, est aujourd’hui un pays développé. La France, au contraire, régresse.

Extrait :
La crise du coronavirus est le révélateur des fragilités stratégiques de la société française. Procédons à une rapide comparaison. La Corée du Sud, géographiquement proche de la Chine, a été l’un des pays les plus précocement et les plus massivement touchés. Cependant, la maladie y est désormais contenue, le nombre de nouveaux cas quotidiens décroît nettement et la mortalité est extrêmement faible (moins de 0,8 %). Et pourtant, la Corée du Sud a refusé le confinement et n’a pris aucune mesure contraignante. Même les restaurants sont ouverts. S’inscrivant dans le même schéma, le Japon, Hong-Kong, Taïwan et Singapour affichent un bilan spectaculaire dans leur lutte contre l’épidémie sans sacrifier ni leur économie ni les libertés fondamentales.

Pourquoi la France ne réagit-elle pas comme la Corée? Il nous faut regarder la vérité en face: la Corée, qui était en 1950 un pays du Tiers-Monde, encore plus pauvre que bien des pays africains, est aujourd’hui un pays développé. La France ne l’est plus. Derrière les illusions du PIB, nous avons perdu en richesse réelle. Comme le souligne Emmanuel Todd dans son nouveau livre, lorsqu’on revient de Corée, du Japon, d’Allemagne ou de Scandinavie et qu’on arrive en France, on est frappé par la régularité des accidents de train ou des pannes d’escalator. Dysfonctionnements typiques des pays sous-développés.

Suite de l'analyse >>>

 
La Corée est indéniablement supérieure dans le traitement de l'épidémie, mais je me méfie des intellos qui sous prétexte de réfléchir pensent sortir des choses intelligentes. La France recule sur certains points, c'est clair!
Je me rappelle de l'Ambassadeur chinois en France qui lors de la coupe du monde de football en 2010, avait dit que le fiasco de l'Equipe de France était représentatif de la France. En 1998 et en 2018, qu'aurait-il dit?
 
Je me rappelle de l'Ambassadeur chinois en France qui lors de la coupe du monde de football en 2010, avait dit que le fiasco de l'Equipe de France était représentatif de la France. En 1998 et en 2018, qu'aurait-il dit?
Bonsoir Silouane
Certainement suivi ton conseil ! ;)
Et en plus, il a mieux à faire que de partir sur des polémiques, qui ne font pas avancer les choses.
 
Pascal Perrineau : "La pandémie sonne le retour, bienvenu, du tragique" (1/2)
Pascal Perrineau est professeur des Universités à l'IEP Paris, et a dirigé son centre de recherches, le CEVIPOF, jusqu'en 2014.

LE MONDE D'APRES. Replongerons-nous dans l'ancien monde ou sommes-nous en train d'ouvrir un nouveau monde ? C'est "à l'ampleur finale du désastre humain, mais aussi économique, social et politique", à "la manière dont les dirigeants de l'Etat et la puissance publique seront parvenus (ou non) à gérer la crise et sauront (ou non) en tirer les conséquences pour déjà se préparer à la suivante", à, "la façon dont chaque individu reconfigurera (ou non) son double rapport au temps et à l'espace", que Pascal Perrineau conditionne l'envergure civilisationnelle de cette épreuve de vérité. Mais aussi à une irrépressible leçon de l'Histoire : l'omniprésence du "tragique". Leçon qui ramène l'Homme, enivré d'arrogance, de vanité et de pouvoir, prisonnier de son anthropocentrisme, à ce qu'il est réellement : infiniment petit et infiniment vulnérable, infiniment barbare lorsqu'il siphonne le progrès de son sens. "La violence de la pandémie rappelle que le tragique est propre à toute époque, passée et future ; elle rappelle que la maitrise définitive de notre environnement n'existe pas et à tout moment peut être défiée ; elle rappelle que les hommes sont l'agent premier de leur perte. Si ces rappels sur la fragilité sont intégrés par les gouvernants et les citoyens, les leçons de cette pandémie ne seront pas vaines", espère le politologue.


LA TRIBUNE - Ce moment si particulier de début de confinement, comment l'éprouvez-vous intimement, comment l'interprétez-vous intellectuellement ? Je et nous vivons une expérience unique, nommez-vous, de "recentrage"...

Pascal Perrineau -
Absolument. Recentrage d'abord sur le vital : nous essayons de prendre soin de nous et de veiller au soin de nos proches. Recentrage aussi sur l'essentiel : grâce à cette pause subite, grâce à cet arrêt du temps inédit, chacun d'entre nous est invité - dans la douleur pour ceux qui sont exposés à la solitude ou à la précarité - à se recentrer sur lui afin non plus de cultiver son individualité (et son individualisme) mais de préserver le collectif. Dans cette distinction fondamentale de destination, réside sans doute le caractère le plus neuf et le plus intéressant de ce confinement. Vivre soi avec soi pour mieux prendre soin de l'Autre.


Suite de l'entretien >>>


 
Dernière édition:
Nicolas Baverez : "La liberté, première victime du Covid-19 ? "
Nicolas Baverez est historien, économiste, et éditorialiste au Point et au Figaro.

LE MONDE D'APRES. Impuissance des démocraties occidentales ; emballement du populisme ; échec supplémentaire pour l'Europe ; nouvelle guerre froide entre démocratie et régimes autoritaires : voilà, analyse l'économiste et historien Nicolas Baverez, quelques-uns des périls politiques que la catastrophe sanitaire d'ores et déjà révèle ou pourrait exercer sur l'ensemble de la planète. "Le destin de l'Occident se confond avec la double aventure de la raison et de la liberté", poursuit l'essayiste, pronostiquant que cette liberté cristallisera l'affrontement politique, stratégique et idéologique inhérent à l'après-coronavirus. Le salut, c'est-à-dire la nécessité de discernement, de courage et d'engagement, résulte peut-être des attributs de toute crise aussi majeure que cette pandémie : "elle oblige à regarder le monde tel qu'il est et non tel que nous aimons à le rêver", complète l'auteur de L'Alerte démocratique (L'Observatoire, février 2020). Qui, comme une éclatante illustration de l'indicible "moment" que nous traversons, convoque Jean Giono et ses lumineux enseignements sur "l'humanité des hommes" que l'épidémie de choléra lui inspira dans Le Hussard sur le toit.

Extrait :
Dans Le Hussard sur le toit, Jean Giono raconte les aventures d'Angelo Pardi, colonel italien qui, contraint à l'exil pour avoir tué en duel un officier autrichien, part à la recherche de son ami Giuseppe au cœur de l'année 1832, dans une Provence ravagée par le choléra. "Le choléra, explique-t-il, est un révélateur, un réacteur chimique qui met à nu les tempéraments les plus vils ou les plus nobles". Il en va aujourd'hui de même de l'épidémie de coronavirus qui jette une lumière crue non seulement sur le grand écart des comportements humains - de l'héroïsme à l'irresponsabilité et la lâcheté - mais aussi sur la fragilité des systèmes de soins, les déséquilibres du capitalisme mondialisé, la désintégration des sociétés, l'insuffisance des capacités de gestion des crises et l'effondrement de la gouvernance mondiale.

La pandémie se mondialise, 2,6 milliards d'hommes - soit le tiers de l'humanité - étant désormais confinés. Elle présente aujourd'hui un quadruple visage. Elle se stabilise en Asie ; elle touche de plein fouet l'Europe ; elle va atteindre les Etats-Unis avec des conséquences redoutables tant sur la population car 29 millions d'Américains ne disposent d'aucune assurance santé que sur l'économie ; elle reste occultée dans les pays autoritaires pour des raisons idéologiques - notamment en Russie ou en Iran - et dans le monde émergent - Afrique en tête - qui ne dispose le plus souvent pas de systèmes de santé performants. Au total, le coronavirus représente la pire crise sanitaire depuis la grippe espagnole qui tua entre 50 et 100 millions de personnes en 1918.


Suite de l'analyse >>>


 
Fabrice Midal : "Autorisons-nous à sentir ce qu’on vit, la peur, le chagrin, la colère"

Interview. - Comment rester liés au temps du coronavirus ? S’ouvrir au monde ? Entre sentiment de solitude et impression d'isolement, le philosophe Fabrice Midal décrypte notre rapport à l'autre au temps du confinement

Madame Figaro. - Qu’est-ce qu’une «bonne distance» à l’heure de la «distanciation sociale» ? Comment ne pas tomber dans un phénomène de coupure, de rupture collective ?

Fabrice Midal (1). -
On peut d’abord se dire que la distance physique n’est pas une distance morale, humaine : quelle étrange idée, au fond, de croire que parce qu’on est séparé physiquement, on va être coupé des autres. Le trouble que les gens ressentent existe notamment parce que notre époque a identifié le silence et l’arrêt, le fait de ne rien faire, à la mort ; et la relation, le rapport à l’autre, à quelque chose de mouvementé, de manifeste et bruyant. Or ce que nous disent toutes les traditions spirituelles de l’humanité, mais aussi les philosophes et les artistes, c’est précisément que c’est aussi dans l’isolement et la distance que les liens les plus profonds peuvent s’exercer. Au-delà des liens un peu superficiels, mécaniques et même assez brutaux parfois que nous observons dans nos vies quotidiennes, il peut s’ouvrir autre chose.

J’aime beaucoup ces lignes trouvées chez Rilke : «Nous avons eu assez souvent ces temps-ci de tes nouvelles par Mère et sans rien savoir de précis nous devinions que tu traverses une période difficile. Mère ne pourra t’aider, en fait dans la vie personne ne peut aider personne, chaque conflit, chaque désarroi nouveau vous réapprend ceci que l’on est seul. Ce n’est pas aussi fâcheux qu’il semble à première vue, car c’est en même temps le plus positif de la vie, que chacun est tout en lui-même ; son destin, son avenir, son espace, son monde tout entier.»

Suite de l'entretien >>>

 
Trier les malades: les questions qui dérangent par Vincent Tournier Maître de conférence de science politique à l’Institut d’études politiques de Grenoble

Le problème de la pénurie des soins a commencé à se poser pour les masques de protection et, dans une moindre mesure, pour les produits désinfectants, avant de s’étendre à l’accès aux appareils de ventilation mécanique, seul moyen de sauver les malades les plus sévèrement atteints. La presse relate déjà des situations où des tris doivent être effectués et un débat sur l’éthique de la sélection a commencé à émerger.

Pourquoi pas le tirage au sort?

Extrait : Lorsque les traitements sont en nombre insuffisant, une réponse simple pourrait consister à sélectionner les malades au hasard. Il existe des précédents. Le laboratoire Novartis a récemment défrayé la chronique pour avoir offert à cent enfants tirés au hasard un médicament considéré comme le plus cher du monde (2 millions de dollars la dose). Un autre précédent célèbre concerne le traitement du SIDA : à la fin des années 1990, le Conseil national du Sida a proposé d’organiser un tirage au sort pour répartir un nouveau traitement.
Si le tirage au sort ne séduit guère, malgré son caractère égalitaire, c’est parce qu’il se heurte à un autre principe majeur de la démocratie : la liberté, donc la raison. Telle est d'ailleurs la raison pour laquelle le tirage au sort n'a jamais percé en politique, malgré les demandes allant dans ce sens. Dans le cas du coronavirus, si personne n’a suggéré d’utiliser le tirage au sort (y compris dans une forme appauvrie : le premier arrivé est le premier servi), c’est parce que la sélection aléatoire risque de s’avérer contre-productive en gaspillant un bien rare.

De plus, le tirage au sort soulève une autre difficulté, à savoir la question du mérite. Telle était l’objection formulée par Claude Le Pen, économiste de la santé (disparu tout récemment), à propos de la proposition du Conseil du sida sur le recours au tirage au sort en 1996 : « Le tirage au sort garantissait que n’importe qui pouvait être choisi, comme des toxicomanes en prison. S’il y avait un comité de sélection, il aurait forcément pris des critères sélectifs et "humains", ce qui aurait très probablement éliminé de la sélection ces personnes ». Cette objection soulève un enjeu intéressant : tout le monde mérite-t-il d’accéder au traitement ?


Suite de l'analyse >>>


 
Dernière édition:
Diamond Jared et l'effondrement des sociétés par Adeline Beurgaud

Pourquoi la richesse et la puissance sont-elles distribuées inégalitairement selon les sociétés ? Pourquoi certaines sociétés se sont-elles effondrées ? Quel est l'avenir de l'humanité à long terme ? Voila trois thèmes du travail de Diamond Jared Mason, thèmes plus que jamais d'actualité.
  1. La puissance inégalitaire des sociétés
  2. Pourquoi certaines sociétés se sont-elles effondrées ?
  3. Survie ou disparition des sociétés humaines
  4. Survie ou disparition de la société mondiale
  5. Conclusion : une approche multifactorielle
1. La puissance inégalitaire des sociétés

« Pourquoi la richesse et la puissance sont-elles distribuées ainsi et pas autrement ? » est la question centrale du livre : De l'inégalité parmi les sociétés. Essai sur l'homme et l'environnement dans l'histoire.

L'auteur passe en revue les différents facteurs et les chaînes de causalités qui ont aboutit à ce que certains peuples aient pu conquérir des territoires et absorber d'autres peuples et non le contraire. « L'histoire a suivi des cours différents pour les différents peuples en raison des différences de milieux, non pas de différences biologiques entre ces peuples. » Il s'appuie dans sa démonstration aussi bien sur l'archéologie, la biologie moléculaire, l'épidémiologie, la génétique, la linguistique, l'histoire des technologies.
"On ne peut s'imaginer pourquoi ce ne sont pas les Indiens d'Amérique du Nord qui ont conquis l'Europe avec des caravelles portant mousquets et canons ou pourquoi les Aborigènes australiens n'ont pas dominé l'Asie sans comparer les richesses agricoles de ces régions, les animaux qui y vivent, la lenteur avec laquelle s'est implantée l'agriculture, puis la pensée technicienne et la gestion des ressources."
Du berceau de l'humanité en Afrique il y a environ 7 millions d'années avant J.-C., les hommes ont ensuite migré en Asie dès 1 million d'années avant J.-C., Europe dès 500 000 avant J.-C., Océanie dès 40 000 avant J.-C. et enfin Amérique via le détroit de Béring lorsque celui-ci était au plus bas il y a 20 000 ans.

Dans l'expansion des humains à travers le monde, les barrières géographiques et climatiques ont eu un impact majeur sur la propagation des populations, leurs cultures (végétaux, bétail) et sur les inventions : rapide de par le continent Eurasien dont l'axe est orienté latitudinalement présentant une géographie favorable aux déplacements humains et un climat plutôt homogène ; et de façon bien plus lente et complexe sur les continents Africain et Américain, continents coupés par des déserts, l'isthme de Panama entre les deux Amériques et des climats très hétérogènes pour lesquels l'adaptation des hommes a demandé bien plus de temps, ralentissant conséquemment grandement leur progression.

Suite de l'analyse >>>

 
Pourquoi pas le tirage au sort?


Ma fois ce ne serait pas une premiere dans ce fantastique pays appele la France. Il me semble que c'est ce qui se passe deja dans les universites. En fait on va devenir un gigantesque casino ou l'acces a l'education et la sante vont etre decides par un concours papier ciseaux ... Ce serait comique si ce systeme de m. ne coutait pas les yeux de la tete.

 
La France recule sur certains points, c'est clair!


Non non, elle montre juste son vrai visage. Moi je pense que c'est un probleme d'education. Clairement on n'est pas prepare intellectuellement a faire face a ce genre de situation:
  • Manque d'anticipation (masques? tests?)
  • Manque de prevoyance (1 000 cas sur un porte-avion, quelle surprise ...)
  • Manque de solidarite (autre que financiere - il y a qu'a voir les ephad).
  • Manque de cohesion (a part pour taper sur des casseroles a 20h00)
  • Manque de confiance (etre oblige de recourir au confinement comme des gamins de 4 ans...)
  • Manque de moyens (pas une usine peu faire des masques rapido?)
  • Manque de respect (Diaye qui nous dit qu'on est trop betes pour mettre des masques...)
  • Manque de tolerance (Ile de Re ...)
Bref faillite a tous les etages et grosso modo je crois qu'on merite ce qui nous arrive parcequ'on est des gros c. (pour resumer). Pourquoi on apprend pas ces valeurs importantes pour le vivre en societe et la competitivite de notre pays a nos momes au lieu de leur bourer le ciboulo avec des maths toute la journee???
 
Dernière édition:
Le coronavirus et la mondialisation par Blaise Wilfert Maître de conférences en histoire contemporaine, Ecole normale supérieure, Paris Sciences et Lettres
14 avril 2020


Alors que se déploie dans toute sa violence la pandémie du Covid-19, la « mondialisation », à en lire plus d’un, est la grande responsable de ce qui nous arrive, qu’il s’agisse de la foudroyante rapidité de l’extension du virus, de l’impuissance des États à en arrêter la progression, de l’incapacité du « capitalisme » à produire les équipements médicaux ou de la folie de la spéculation boursière.

Extrait :
Avec pour conséquence logique l’appel répété, avec quelque pathos, à inventer d’urgence le temps d’après, d’après les folies de la mondialisation. L’ampleur du choc que représente le Covid-19 offre une caisse de résonance idéale pour rejouer ainsi une musique en fait déjà ancienne, connue au moins depuis les années 1990 (voire les années… 1890), mais avec un écho incomparable, et donc aussi particulièrement inquiétant. Définie à la fois comme une libéralisation (le triomphe de l’économie de marché sans frontières) et comme planétarisation (l’unification de la planète par des flux de tous ordres, information, migrants, idées et représentations, touristes, pratiques religieuses), la mondialisation serait devenue une forme de pathologie fatale pour le monde. D’où l’urgence à démondialiser.

Pourtant, il faut le redire, plus de vingt ans après Paul Krugman, la mondialisation n’est pas coupable, et ceux qui prétendent actuellement l’inverse, avec une passion communicative, faisant mine de tirer les conclusions d’une lucide analyse du passé récent, s’appuient en fait sur des récits historiques biaisés pour imposer un agenda politique, explicite ou implicite. Qu’on permette donc à un historien de tenter d’en dire un mot, puisque comprendre le temps dans lequel nous sommes impose de comprendre les temps dont nous venons.

Suite de l'analyse >>>

 
Le coronavirus et la mondialisation par Blaise Wilfert Maître de conférences en histoire contemporaine, Ecole normale supérieure, Paris Sciences et Lettres
14 avril 2020


Alors que se déploie dans toute sa violence la pandémie du Covid-19, la « mondialisation », à en lire plus d’un, est la grande responsable de ce qui nous arrive, qu’il s’agisse de la foudroyante rapidité de l’extension du virus, de l’impuissance des États à en arrêter la progression, de l’incapacité du « capitalisme » à produire les équipements médicaux ou de la folie de la spéculation boursière.

Extrait :
Avec pour conséquence logique l’appel répété, avec quelque pathos, à inventer d’urgence le temps d’après, d’après les folies de la mondialisation. L’ampleur du choc que représente le Covid-19 offre une caisse de résonance idéale pour rejouer ainsi une musique en fait déjà ancienne, connue au moins depuis les années 1990 (voire les années… 1890), mais avec un écho incomparable, et donc aussi particulièrement inquiétant. Définie à la fois comme une libéralisation (le triomphe de l’économie de marché sans frontières) et comme planétarisation (l’unification de la planète par des flux de tous ordres, information, migrants, idées et représentations, touristes, pratiques religieuses), la mondialisation serait devenue une forme de pathologie fatale pour le monde. D’où l’urgence à démondialiser.

Pourtant, il faut le redire, plus de vingt ans après Paul Krugman, la mondialisation n’est pas coupable, et ceux qui prétendent actuellement l’inverse, avec une passion communicative, faisant mine de tirer les conclusions d’une lucide analyse du passé récent, s’appuient en fait sur des récits historiques biaisés pour imposer un agenda politique, explicite ou implicite. Qu’on permette donc à un historien de tenter d’en dire un mot, puisque comprendre le temps dans lequel nous sommes impose de comprendre les temps dont nous venons.

Suite de l'analyse >>>

L'analyse paraît intéressante, je la lirai dans la journée.
 
Rémi Pellet: «Cette crise impose une réforme de la pédagogie universitaire» Par Rémi Pellet professeur de droit à l’Université de Paris et à Sciences Po Paris.

TRIBUNE - Et si le retour à l’université prévu après l’été était l’occasion de changer radicalement la pédagogie dans le supérieur? Pour Rémi Pellet, professeur de droit, la mise en place de «la classe inversée» avec Internet permettrait de conjuguer les impératifs sanitaires de distanciation sociale et une élévation du niveau des étudiants.

Extrait :
Le confinement a conduit à la fermeture des universités. Les enseignants-chercheurs doivent veiller à assurer la continuité «pédagogique». L’adjectif est discutable car les étudiants ne sont pas des enfants, mais on le reprendra pour proposer un changement radical des méthodes d’enseignement dans le supérieur, concernant au moins les sciences sociales.

Aujourd’hui, les étudiants peuvent avoir accès à des cours, articles et même ouvrages mis en ligne sur diverses plateformes informatiques. Certains professeurs dispensent des cours par audio ou visioconférences. Mais ces pratiques sont considérées comme un pis-aller, en attendant le retour à la normale. Or, il y a tout lieu de penser que le risque épidémique va perdurer et qu’il sera impossible de réunir dès septembre des centaines d’étudiants dans des amphithéâtres où il faudrait faire respecter des mesures de distanciation sociale (physique en fait). Les universités pourraient alors devenir de véritables «clusters». Ce risque sanitaire majeur impose aujourd’hui l’adoption dans l’urgence d’une réforme pédagogique qui aurait dû être entreprise depuis bien longtemps déjà, pour tenter de corriger un peu les défaillances du système scolaire.
«La majorité des bacheliers ne maîtrise pas les rudiments de la langue française (grammaire, orthographe et, surtout, syntaxe)».Rémi Pellet, professeur de droit
En effet, qu’on y voie le résultat délétère de pratiques éducatives aberrantes ou de politiques sociales discriminatoires, le fait est désormais incontesté: aujourd’hui, la majorité des bacheliers ne maîtrise pas les rudiments de la langue française (grammaire, orthographe et, surtout, syntaxe). Tout indique que la situation s’est dégradée ces dernières années. Or, à l’Université, dans les années de licence, les cours magistraux ne sont souvent rien d’autre que des séances de dictées en «cybercafés»: les étudiants, censés suivre attentivement les propos du professeur, sont en réalité massivement connectés à internet, occupés à autre chose.

Suite de l'analyse >>>