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NEUF
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La Chine, meilleure alliée stratégique de l’Afrique ? Les cas camerounais et ivoirien
La Chine commence à bousculer l’Occident pour imposer de nouvelles tendances dans les rapports stratégiques avec l’Afrique. Dans cette dualité qui se dessine, comme au temps de la guerre froide Est-Ouest, Jean-Paul Pougala note des dissidences qui se font jour de la part de certains pays pour tendre vers Pékin, là où d’autres restent dans leur ancrage traditionnel. D’un côté il salue la mutation camerounaise, de l’autre il déplore le statu quo ivoirien.
Les douze derniers mois ont été très intenses sur le continent africain avec d'importantes élections qui ont suscité beaucoup d'intérêts même hors d'Afrique, parce que l'issu de chacune d'elle marquait les nouvelles frontières du partage des zones d'influence qui sont en train de se renégocier entre les anciens maîtres du monde, l'Occident et le nouveau, la Chine. En paraphrasant un classement qu'on a vu en Ukraine, ont peut dire qu'en Côte d'Ivoire, en Zambie ou au Libéria, ce sont les Pro-Occident qui ont gagné la partie. Au Cameroun ou République Démocratique du Congo, ce sont les pro-Chine qui ont gagné.
Depuis les indépendances africaines, il y a environ 50 ans, dans la logique de la guerre froide, les pays africains étaient tous sous l'une des deux bannières : pro-occident ou pro-Union Soviétique. A la chute du Mur de Berlin en 1989 et la conséquente fin de la période de la guerre froide, toute l'Afrique était devenue, de gré ou de force pro-Occident. Le tandem Fond Monétaire International et Banque Mondiale avait de fait pris le pouvoir en Afrique, décidant de tout ou partie de la politique économique, financière, sociale et même juridique de bon nombre de pays africains. Après ces 20-30 ans de ce pouvoir en Afrique, il n'existe à ce jour aucune exception de pays qui aurait réussi grâce à ces recettes venues tout droit de Washington. Ce qui a amené certains pays à entrer en dissidence, à entrer en rébellion contre ce pouvoir ultralibéral FMI-BM qui a une particularité et c'est que lorsqu'il échoue, le chapeau n'est porté que par le dirigeant africain rebaptisé pour la circonstance en "dictateur africain" afin de détourner l'attention de la vraie paternité de l'échec : l'ultralibéralisme occidental. Cette tragi-comédie continue de nos jours, puisque ce sont ces mêmes recettes qu'on prescrit aujourd'hui à la Grèce, au Portugal et à l'Italie qui ont toutes échoué il y a 20 ans en Afrique.
Ces dissidents africains ont regardé ailleurs vers l'Orient, vers la Chine. Ils ne sont pas très nombreux, parce qu'il fallait du courage pour braver les pressions occidentales, lorsque cela ne se terminait pas par des coups d'Etat bien pilotés par l'entremise des rebelles qui n'ont jamais expliqué comment et par qui ils avaient été financés. Et c'est dans ce contexte que s'inscrit désormais tous les rendez-vous électoraux sur le continent africain, où le seul vrai projet de société est de savoir si le pays se contente du statu quo habituel avec le niveau de misère qu'on connait depuis 50 ans au service de l'Occident ou alors s'il fera le saut dans le vide en choisissant la Chine, pour émerger avec elle, sans savoir où on va atterrir.
Aujourd'hui, je vais prendre en examen deux pays africains qui ont fait deux choix opposés, l'un, la Côte d'ivoire, a choisi de rester comme avant, sous l'Occident et l'autre, le Cameroun, qui a fait le choix de se jeter dans le vide avec la Chine. Lequel des deux pays a fait le bon choix ? pour répondre à cette question, je me garderai bien de donner des jugements de valeur à une élection ou à une autre. Je ne vais pas refaire l'histoire ici. Mais il me plait de revoir les événements sous la loupe purement géostratégique.
Le Cameroun et la Côte d'Ivoire sont deux pays africains qui ont récemment connu des élections et le point commun des deux élections c'est que les deux géants mondiaux, la Chine et l'Occident avaient fait leur choix et apporté leur soutien. En Côte d'Ivoire, on peut être d'accord ou pas d'accord sur les méthodes utilisées, mais chaque contemporain a pu assister en direct à l'intronisation par la France et les Etats-Unis d'une administration africaine. Il n'est donc pas erroné d'affirmer que le pouvoir en place est pro-Occident.
Au Cameroun, M. Biya a été le chouchou de Pékin, cette ville étant devenue au cours des années sa seule destination officielle hors des frontières camerounaises. Lors du dernier congrès de son parti, le RDPC, le parti de Sarkozy, l'UMP, n'était pas invité comme d'habitude. A sa place, c'est le Parti Communiste Chinois qui a été convié et désigné comme le "meilleur parti ami" du Cameroun. Et que dire du fait que les résultats des élections présidentielles au Cameroun ont été rendus publiques à Pékin, 4 heures avant la proclamation par la Cour Suprême du Cameroun. Ce qui nous amène à dire, sans nous tromper, que le positionnement du Cameroun est pro-Chine.
Etait-ce un simple hasard, la décision conjointe de Pékin et Yaoundé, de choisir la date du 8 octobre 2011, un jour avant les élections, pour la cérémonie présidée par Biya et le représentant chinois pour poser ensemble la première pierre du chantier du port en eau profonde de Kribi avec une première enveloppe de 1 milliard de dollars versés par la Chine ? N'était-ce pas un vrai défi lancé aux Occidentaux qui eux sont dans une profonde crise financière ? Dans tous les cas, l'électorat camerounais a approuvé ce choix de ses dirigeants, le lendemain, dans les urnes, en élisant Biya avec 78% des voix. En comparaison, on est très loin de la gestion calamiteuse des Occidentaux de la situation ivoirienne quelques mois auparavant.
QUI DU CAMEROUN ET DE LA COTE D'IVOIRE A EU RAISON DE SON CHOIX ?
S'il est encore trop tôt pour parler du Cameroun on peut déjà tirer les premières conclusions sur la Cote d'ivoire et constater que la situation aujourd'hui est de loin pire que celle qui prévalait durant la crise sous Laurent Gbagbo. Le FMI vient d'avancer un chiffre de -7,5 % de croissance du pays pour l'année 2011, faisant ainsi de la Côte d'Ivoire le seul pays en récession de tout le continent africain, c'est-à-dire, pire que la Somalie où même sans gouvernement stable il y aura eu 1% de croissance pour 2011, c'est-à-dire une croissance somme toute positive. Les mêmes sources nous informent des contre-performances de toute l'économie ivoirienne où l'Etat doit aux entreprises la rondelette somme de 900 milliards de FCFA. Et la totalité du budget 2012 à peine voté ne pourra être financé que de l'étranger.
Prenons au hasard une date commune dans les deux pays, la date du 23 novembre 2011. Quelle est l'actualité principale en Côte d'Ivoire ? C'est le porte-parole du président de la Commission européenne, José Manuel Durao Barroso qui nous annonce qu’Alassane Drame Ouattara se trouve a Bruxelles où il va rencontrer, dans la journée, Karel de Gucht, commissaire Européen chargé du Commerce, pour parler des exportations du cacao ivoirien vers les pays de l'Union européenne.
Au même moment, au Cameroun, c'est Martin Yankwa, Inspecteur général du ministère camerounais de l'Industrie, des Mines et du Développement Technologique qui annonce la signature d'un accord pour la création d'une usine, la SITRACO, d'une valeur de 1,6 milliard de FCFA pour la transformation à Douala de 40% du coton camerounais pour alimenter les nombreux hôpitaux que la Chine construit un peu partout au Cameroun, avec des consommables comme les compresses médicales et des rouleaux de gaze hydrophile de coton.
Dans le premier cas, il s'agit de l'énième visite en Occident depuis la prise de pouvoir au mois de mai 2011 dernier. La première visite était le 26 mai 2011 au sommet du G8 à Deauville en France, où l'ami Sarkozy, président de la France l'a présenté comme un trophée, il avait une grande envie de célébrer la victoire militaire de sa présidence mais avait oublié d'informer son protégé Monsieur Ouattara que lui-même se trouvait en pleine tempête financière avec les 3 principales banques qui venaient de perdre en bourse près de 40% de leur valeur, ce qui atteindra très vite les jours suivants, 65% pour la plus grande. Il y a eu le 27/07/2011 la visite à Washington pour demander de l'argent. Malheureusement ici aussi, Monsieur Obama était en pleine querelle avec la nouvelle majorité républicaine au Congrès qui ne voulait pas lui octroyer une rallonge pour de nouvelles dettes ; et du coup, accompagné des autres Présidents Africains qui semblaient tous à la Maison Blanche comme des écoliers dans le bureau du Directeur d'école, les photos que la Maison Blanche a publiées de cette rencontre donnent l'amère impression de se trouver à une cérémonie de funérailles.
La Chine commence à bousculer l’Occident pour imposer de nouvelles tendances dans les rapports stratégiques avec l’Afrique. Dans cette dualité qui se dessine, comme au temps de la guerre froide Est-Ouest, Jean-Paul Pougala note des dissidences qui se font jour de la part de certains pays pour tendre vers Pékin, là où d’autres restent dans leur ancrage traditionnel. D’un côté il salue la mutation camerounaise, de l’autre il déplore le statu quo ivoirien.
Les douze derniers mois ont été très intenses sur le continent africain avec d'importantes élections qui ont suscité beaucoup d'intérêts même hors d'Afrique, parce que l'issu de chacune d'elle marquait les nouvelles frontières du partage des zones d'influence qui sont en train de se renégocier entre les anciens maîtres du monde, l'Occident et le nouveau, la Chine. En paraphrasant un classement qu'on a vu en Ukraine, ont peut dire qu'en Côte d'Ivoire, en Zambie ou au Libéria, ce sont les Pro-Occident qui ont gagné la partie. Au Cameroun ou République Démocratique du Congo, ce sont les pro-Chine qui ont gagné.
Depuis les indépendances africaines, il y a environ 50 ans, dans la logique de la guerre froide, les pays africains étaient tous sous l'une des deux bannières : pro-occident ou pro-Union Soviétique. A la chute du Mur de Berlin en 1989 et la conséquente fin de la période de la guerre froide, toute l'Afrique était devenue, de gré ou de force pro-Occident. Le tandem Fond Monétaire International et Banque Mondiale avait de fait pris le pouvoir en Afrique, décidant de tout ou partie de la politique économique, financière, sociale et même juridique de bon nombre de pays africains. Après ces 20-30 ans de ce pouvoir en Afrique, il n'existe à ce jour aucune exception de pays qui aurait réussi grâce à ces recettes venues tout droit de Washington. Ce qui a amené certains pays à entrer en dissidence, à entrer en rébellion contre ce pouvoir ultralibéral FMI-BM qui a une particularité et c'est que lorsqu'il échoue, le chapeau n'est porté que par le dirigeant africain rebaptisé pour la circonstance en "dictateur africain" afin de détourner l'attention de la vraie paternité de l'échec : l'ultralibéralisme occidental. Cette tragi-comédie continue de nos jours, puisque ce sont ces mêmes recettes qu'on prescrit aujourd'hui à la Grèce, au Portugal et à l'Italie qui ont toutes échoué il y a 20 ans en Afrique.
Ces dissidents africains ont regardé ailleurs vers l'Orient, vers la Chine. Ils ne sont pas très nombreux, parce qu'il fallait du courage pour braver les pressions occidentales, lorsque cela ne se terminait pas par des coups d'Etat bien pilotés par l'entremise des rebelles qui n'ont jamais expliqué comment et par qui ils avaient été financés. Et c'est dans ce contexte que s'inscrit désormais tous les rendez-vous électoraux sur le continent africain, où le seul vrai projet de société est de savoir si le pays se contente du statu quo habituel avec le niveau de misère qu'on connait depuis 50 ans au service de l'Occident ou alors s'il fera le saut dans le vide en choisissant la Chine, pour émerger avec elle, sans savoir où on va atterrir.
Aujourd'hui, je vais prendre en examen deux pays africains qui ont fait deux choix opposés, l'un, la Côte d'ivoire, a choisi de rester comme avant, sous l'Occident et l'autre, le Cameroun, qui a fait le choix de se jeter dans le vide avec la Chine. Lequel des deux pays a fait le bon choix ? pour répondre à cette question, je me garderai bien de donner des jugements de valeur à une élection ou à une autre. Je ne vais pas refaire l'histoire ici. Mais il me plait de revoir les événements sous la loupe purement géostratégique.
Le Cameroun et la Côte d'Ivoire sont deux pays africains qui ont récemment connu des élections et le point commun des deux élections c'est que les deux géants mondiaux, la Chine et l'Occident avaient fait leur choix et apporté leur soutien. En Côte d'Ivoire, on peut être d'accord ou pas d'accord sur les méthodes utilisées, mais chaque contemporain a pu assister en direct à l'intronisation par la France et les Etats-Unis d'une administration africaine. Il n'est donc pas erroné d'affirmer que le pouvoir en place est pro-Occident.
Au Cameroun, M. Biya a été le chouchou de Pékin, cette ville étant devenue au cours des années sa seule destination officielle hors des frontières camerounaises. Lors du dernier congrès de son parti, le RDPC, le parti de Sarkozy, l'UMP, n'était pas invité comme d'habitude. A sa place, c'est le Parti Communiste Chinois qui a été convié et désigné comme le "meilleur parti ami" du Cameroun. Et que dire du fait que les résultats des élections présidentielles au Cameroun ont été rendus publiques à Pékin, 4 heures avant la proclamation par la Cour Suprême du Cameroun. Ce qui nous amène à dire, sans nous tromper, que le positionnement du Cameroun est pro-Chine.
Etait-ce un simple hasard, la décision conjointe de Pékin et Yaoundé, de choisir la date du 8 octobre 2011, un jour avant les élections, pour la cérémonie présidée par Biya et le représentant chinois pour poser ensemble la première pierre du chantier du port en eau profonde de Kribi avec une première enveloppe de 1 milliard de dollars versés par la Chine ? N'était-ce pas un vrai défi lancé aux Occidentaux qui eux sont dans une profonde crise financière ? Dans tous les cas, l'électorat camerounais a approuvé ce choix de ses dirigeants, le lendemain, dans les urnes, en élisant Biya avec 78% des voix. En comparaison, on est très loin de la gestion calamiteuse des Occidentaux de la situation ivoirienne quelques mois auparavant.
QUI DU CAMEROUN ET DE LA COTE D'IVOIRE A EU RAISON DE SON CHOIX ?
S'il est encore trop tôt pour parler du Cameroun on peut déjà tirer les premières conclusions sur la Cote d'ivoire et constater que la situation aujourd'hui est de loin pire que celle qui prévalait durant la crise sous Laurent Gbagbo. Le FMI vient d'avancer un chiffre de -7,5 % de croissance du pays pour l'année 2011, faisant ainsi de la Côte d'Ivoire le seul pays en récession de tout le continent africain, c'est-à-dire, pire que la Somalie où même sans gouvernement stable il y aura eu 1% de croissance pour 2011, c'est-à-dire une croissance somme toute positive. Les mêmes sources nous informent des contre-performances de toute l'économie ivoirienne où l'Etat doit aux entreprises la rondelette somme de 900 milliards de FCFA. Et la totalité du budget 2012 à peine voté ne pourra être financé que de l'étranger.
Prenons au hasard une date commune dans les deux pays, la date du 23 novembre 2011. Quelle est l'actualité principale en Côte d'Ivoire ? C'est le porte-parole du président de la Commission européenne, José Manuel Durao Barroso qui nous annonce qu’Alassane Drame Ouattara se trouve a Bruxelles où il va rencontrer, dans la journée, Karel de Gucht, commissaire Européen chargé du Commerce, pour parler des exportations du cacao ivoirien vers les pays de l'Union européenne.
Au même moment, au Cameroun, c'est Martin Yankwa, Inspecteur général du ministère camerounais de l'Industrie, des Mines et du Développement Technologique qui annonce la signature d'un accord pour la création d'une usine, la SITRACO, d'une valeur de 1,6 milliard de FCFA pour la transformation à Douala de 40% du coton camerounais pour alimenter les nombreux hôpitaux que la Chine construit un peu partout au Cameroun, avec des consommables comme les compresses médicales et des rouleaux de gaze hydrophile de coton.
Dans le premier cas, il s'agit de l'énième visite en Occident depuis la prise de pouvoir au mois de mai 2011 dernier. La première visite était le 26 mai 2011 au sommet du G8 à Deauville en France, où l'ami Sarkozy, président de la France l'a présenté comme un trophée, il avait une grande envie de célébrer la victoire militaire de sa présidence mais avait oublié d'informer son protégé Monsieur Ouattara que lui-même se trouvait en pleine tempête financière avec les 3 principales banques qui venaient de perdre en bourse près de 40% de leur valeur, ce qui atteindra très vite les jours suivants, 65% pour la plus grande. Il y a eu le 27/07/2011 la visite à Washington pour demander de l'argent. Malheureusement ici aussi, Monsieur Obama était en pleine querelle avec la nouvelle majorité républicaine au Congrès qui ne voulait pas lui octroyer une rallonge pour de nouvelles dettes ; et du coup, accompagné des autres Présidents Africains qui semblaient tous à la Maison Blanche comme des écoliers dans le bureau du Directeur d'école, les photos que la Maison Blanche a publiées de cette rencontre donnent l'amère impression de se trouver à une cérémonie de funérailles.