« Kaili Blues » : épopée sans fin ni début dans l’empire du Milieu

Orang Malang

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23 Oct 2005
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常熟,江苏
LE MONDE du 22 mars 2016

D’immenses artistes de cinéma ont éclos en Chine continentale depuis une vingtaine d’années. Deux noms résument commodément la chose : Jia Zhang-ke et Wang Bing, qui se partagent, à quelques entorses près, le privilège de l’excellence dans les sphères de la fiction et du documentaire.

Un jeune réalisateur, à compter d’aujourd’hui, semble pouvoir s’imposer à cette hauteur, à en juger par la grâce, le culot, l’étrangeté, l’impétueuse liberté de son premier long-métrage. Il se nomme Bi Gan, il a moins de 30 ans et signe, avec Kaili Blues, un film où la poésie – pas la joliesse qui en tient souvent lieu au cinéma – se porte comme la fleur au fusil. Aussi bien, demain, ce qu’à Dieu ne plaise, n’aurons-nous plus de nouvelles de Bi Gan.

http://pan.baidu.com/s/1sjVDhTj
 
Bi Gan, artisan pick-poète

LE MONDE du 22 mars 2016

Sidérant itinéraire que celui de Bi Gan : son premier long-métrage, Kaili Blues,a fait de cet enfant du Guizhou, province reculée et pauvre du sud-ouest de la Chine, un nom qui compte déjà sur la planète du cinéma. Tout a commencé par Stalker, d’Andreï Tarkovski. Un film « pénible à regarder », nous dit le jeune cinéaste de bientôt 27 ans. Lunettes rondes, front dégagé, diction lente, il nous parle sur Skype depuis Shanghaï avant de s’envoler pour New York pour présenter Kaili Blues dans un festival. Tellement « pénible » qu’il en digérait « un petit bout tous les jours » sur son ordinateur portable, dans son dortoir de l’Institut de communication du Shanxi, à Taiyuan, au centre de la Chine. Il séchait allègrement les cours de cette école peu réputée des métiers de la télévision, qu’il avait rejointe avec l’idée de se former au documentaire animalier. Puis Stalker l’a envoûté : « L’atmosphère, la manière dont il traite du temps… Je me suis mis à l’aimer – et j’ai regardé ensuite tous les films de Tarkovski. »Kaili Blues a pour titre en chinois Pique-nique au bord du chemin, comme la nouvelle de science-fiction des frères Strougatski dont s’inspira Stalker.

http://pan.baidu.com/s/1dDJQv4H